dimanche 14 janvier 2007

36 aphorismes à l’usage des ados

1. Dieu a été un enfant débile. Il est né des spermatozoïdes de l’Infini et d’un ovule de l’Eternité. Un rejeton de l’inceste.
2. On est issu d’une longue lignée d’aïeuls aux consciences de bêtes de somme, n’attendant plus que la guillotine du destin tombe sur leurs cerveaux garnis de tissus adipeux et atteints de la dégénérescence.
3. Ouais, l’idée de Dieu existe, elle a une forme parfaite, une sphère coloriée, c’est un ballonnet de savon. L’orgueil est l’aguille qui perce ce ballonnet.
4. L’image de Moi doit être préservée, quels que soient les frustrations et les bonheurs qui me hantent.
5. Lorsqu’il a prononcé la Parole, au moment de la Genèse, Dieu était certainement soûl. Car ce n’est que le bégaiement divin qui puisse expliquer l’imperfection de toutes les choses.
6. Les faibles aiment parce qu’ils n’on pas le pouvoir de mépriser.
7. Domine, t’es la fumée s’élevant de la braise de ma cigarette, t’es la fumée dont les faibles se heurtent.
8. Je suis écoeuré lorsque je pense à tous ceux qui se vanteront de m’avoir connu ou parlé. Seul celui qui m’adresse des jurons ne me trahit pas.
9. Je n’ai des sens que pour moi-même.
10. Je regards mes mains et sens qu’elles ne m’appartiennent plus.
11. Je m’en fous de la souffrance des faibles. Et de celle des forts.
12. Je suis seul. Je l’ai toujours été. Je ne sens pas le besoin de communiquer. Quand je l’ai senti, j’ai hurlé. Une nausée presqu’ organique que le monde et les humains me provoquent.
13. Je sens comment, avec chaque pensée, une autre plume de mes ailes se détache. Un ange filant.
14. Je ne donne pas un fétu de tout le tourment du monde. Inactif, et je suis plus fécond que tous ceux qui se débattent dans l’agitation masturbatoire de l’illusion qu’ils produisent, qu’ils participent quelque peu à l’éructation asthmatique de la société.
15. Je sais que je souffre plus que n’importe quel autre mortel et ça me suffit.
16. Il n’y a que ma propre logique. Tout ce qui est en dehors de moi est illusoire.
17. Je porte le génie sur mes épaules comme une croix, comme la croix de la laideur, de la solitude, de l’impuissance de croire ou d’aimer. Des croix comme des ailes démoniaques qui, loin de me peser, préparent mon avènement.
18. Domine, t’es la réflexion de ma grandeur.
19. L’oubli est la tentative de remémorer le rien, la nostalgie du Néant.
20. Mes paroles ne sont que des jurons, j’ai été infecté par la damnation de la blasphémée. Sous mon regard, les choses tombent en ruine. Y a-t-il une chose plus suave et plus sinistre que d’humilier la femme qui s’offre à toi ?
21. Si penseur qu’un roseau puisse être, il épaule sa fragilité comme un triste fardeau.
22. Les petits quadrupèdes humains rampant sur la platitude de leurs cerveaux me dégoûtent. J’écraserais les voûtes de leurs crânes grotesquement friables, à tous, sans exception ni regret.
23. Dieu, étourdi et fou, s’est suicidé. Un fol innocent, aux yeux tristes, éprouvant une déception désespérée. Je le vois impuissant, balançant entre ne pas être et mourir.
24. L’introspection est le catafalque du soi. La contemplation de la psyché n’est que l’analyse des viscères d’un cadavre.
25. L’Etre est survenu avec moi et finira avec moi.
26. L’orgueil est une éthique supérieure. Je m’en fous si mes actions sont morales ou non, ce qui compte c’est qu’elles satisfassent mes nécessités.
27. En contemplant la médiocrité qui m’entourait, j’ai dédaigné impitoyablement les mortels. Après quoi, une infinie indifférence m’a enveloppé. J’ai plongé en moi-même, je me vivais. J’étais devenu le monde où j’étais manifeste.
28. Serait-il possible que tout se réduise à l’angoisse ?
29. Je suis un cierge dans la nuit. En éclairant, je m’épuise.
30. Le monde est un hospice de l’absurde.
31. Franchir les barrières de l’espace et du temps, anéantir toute loi physique, n’est-ce une subtilité de ma conscience de condamné à l’éternel autodafé sur le bûcher de l’érotisme ?
32. L’orgueil peut survivre en l’absence de toute conscience, il est substance, il existe pour soi-même et se suffit à soi-même.
33. Tout m’est dû, tout m’est permis, personne ne peut me juger.
34. L’équivoque est le noyau dur de toute forme de pensée.
35. En possédant la solitude, on possède tout. Mais on est trop ennuyé pour posséder, on se contente de détenir. Je cultive les nuances pour ne pas perdre les essences.
36. Pourquoi se débatte-on, comme autant de Sisyphes, charriant nos destinés au fil des perpétuelles désillusions ?